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C'était inattendu. En fait, il ne s'attendait pas du tout à ça. Il avait tout le mal du monde à s'imaginer compter pour quelqu'un, encore plus Aden. Il écoute ce qu'il lui dit, et il pense presque coupable qu'il est sorti, hier, et qu'il ne s'est rien passé de spécial à part sa rencontre avec la gamine. Mais Abysse était dans les parages, constamment, il le sentait.
Il se sentait presque poussé à ne pas être sérieux, mais ses propres paroles lui donnaient envie de soupirer. Un silence plutôt confortable s'était installé entre eux deux.
Il était huit heures quinze. Ils étaient plus qu'en retard. Mais si Aden avait un autre plan derrière la tête, Amaury serait plus qu'heureux de le suivre. Il était curieux. Trop curieux. On ne pouvait pas lui en vouloir.
Il lui avait souri à nouveau, ayant lâché sa main.
La vérité c'est qu'il pourrait ne jamais se pointer au conseil. Et alors ? Ils se demanderaient pourquoi il n'était pas venu, d'autant plus pourquoi il n'était pas venu et avait traîné avec Amaury, mais c'était lui la loi, c'était lui qui décidait, et lui, il avait sacrément envie d'envoyer bouler toute forme d'autorité, même si justement il était l'autorité. Intéressant. Amaury avait dû lui retourner le cerveau.
Un nouveau regard à droite, à gauche, il plisse les yeux, inspire, tout bas, il a retiré sa main.
* Les vagabonds ne sont pas notre priorité. Quelque chose de plus urgent me tracasse.
Oui, le fait qu'ils soient trempés, par exemple. Bon, certes, il avait pensé à se munir d'un parapluie comme tout le monde le faisait à présent, mais ça n'empêchait pas la pluie de venir s'infiltrer dans le tissus de son pantalon de costume. Rien de plus désagréable.
* Abysse se montre beaucoup plus qu'avant, et ses rangs grandissent. À notre niveau, nous ne pouvons rien faire.
Il admet, humblement.
* Il faut qu'ils s'entretuent.
Il sait ce qu'il veut, Aden. Il semble hésiter.
* Ah, à moins que tu t'attendes juste à une balade romantique dans le centre.
Tout de même, il vient de lui proposer son bras.
Il tire un peu sur son bras. Ils ont l'air cons, après tout, à rester plantés là pour discuter, au milieu de la route vide en plus. Ils ont l'air cons, et suspects en plus de cela. Il passe son bras autour de celui d'Aden l'air de rien.
Il lui sourit, solaire, on dirait qu'ils parlent de la pluie et du beau temps (bon, de la pluie et de la pluie, en l’occurrence) le petit couple. On ne dirait pas du tout qu'ils sont en train de prévoir un massacre souterrain.
Aden avait plus de savoir sur lui concernant Abysse et les vagabonds. Il se demandait même pourquoi un savant en la matière tel que lui avait daigné demander de l'aide à un ignorant comme Amaury.
Il essayait.
Il avise Amaury quelques instants, pesant toujours le pour et le contre de lui dire les choses qu'il sait, qu'il n'a dit à personne, qu'il garde pour lui, dans l'intérêt commun. Mais Laney s'évertue à lui répéter qu'il ne peut pas tout garder sur ses épaules, constamment, et il accepte ça, au moins cette fois, avec Amaury. Même si les mots de Laney avaient sûrement vocation à lui faire apprendre des choses, à elle. Enfin, il n'en sait rien, il a confiance en elle.
* Il y a de plus en plus de groupes, mais certains groupes se détachent et gardent en importance, celui d'Abysse est celui qui m'inquiète le plus, parce qu'Abysse est ...
Il s'arrête de parler un instant, comme en suspend, il jette un regard à Amaury, considère qu'il comprend.
* Enfin, tu sais, tu l'as rencontré.
De toute évidence Aden aussi, assez pour savoir, pour avoir senti ce malaise, cette terreur. Il esquisse un sourire se remet à marcher tranquillement, le parapluie au dessus de leur tête, leur discussion entrecoupée de bruit des gouttières sur la toile tendue.
* Je pense que ses fervents n'ont rien à faire de l'eau, je pense qu'il maîtrise cette situation. Et c'est ça qui me fait peur. J'en viens à me demander si... Ce n'est pas lui, qui la contrôle.
Il jette un œil à Amaury, cherchant à savoir s'il le prendra pour un fou. Personne ne peut contrôler des conditions météorologiques, pas vrai ?
Ce qui était d'autant plus inquiétant, d'ailleurs. Amaury observait la pluie battante, qui rendait toute la ville fatiguée et maussade, et se disait que c'était une façon bien insidieuse de les épuiser. Au final, cela ressemblait pas mal à l'idée qu'il se faisait d'Abysse.
Mince, il aurait dû rester plus longtemps avec Abysse. Quoique, non, ça, ce n'était pas une bonne idée.
* Oh, je vois.
Il ne sait pas. Il ne sait pas si Abysse est capable de les submerger. Il ne connait réellement l'étendue de ses capacités, et avant la pluie, il aurait même estimé qu'il n'avait qu'un joli minois et une voix qui porte. Bon sang il avait tellement tort. Un frisson le parcourt, il ramène Amaury à lui et presse un peu le pas.
* Il est possible qu'il soit si sadique qu'il préfère nous voir mourir de peur que mourir noyés.
Il semble réfléchir, avant de murmurer, tout bas.
* Ou alors ce n'est pas ça. L'eau monte. Oui, mais d'abord dans toutes les parties souterraines de la ville. Si je doute qu'il ai quelque chose à faire des mines et autres galeries, je sais qu'au moins un groupe de vagabonds se trouve dans les souterrains. Alors... Tu crois qu'il serait possible qu'il en ai après eux ?
Oui, ça arrangerait certainement Abysse, qu'ils décident de s'occuper des autres vagabonds - parce qu'ils ne seraient peut-être pas tous d'accord d'être ensevelis sous l'eau. Amaury soupire doucement, calant sa tête contre l'épaule d'Aden.
* Tu sais. Au final, personne n'est encore mort au sein du conseil des conséquences d'Abysse. Alors... Je me demande... Peut-être que ça n'a rien à voir avec nous, ou même avec la ville.
Peut-être que ça n'avait de rapport qu'avec Abysse et ce qui se trouvait dans sa tête, du coup. Il eut un froncement de sourcil et baissa les yeux pour l'observer. Il y eut un léger moment de flottement. Il eut un sourire tendre, doux, complice finalement.
- entrêmeler vos doigts.
- lui sourire en retour.
- reprendre la discussion.
- "ça a forcément à voir avec la ville".
Il s'arrêta à son tour, surpris de le voir stopper leur marche. Abysse, vraiment... Quel homme d'ambiance. C'était clair que la ville avait un tout nouveau cachet grâce à la pluie. Il avait écouté Aden avec attention, venant naturellement entremêler leurs doigts.
* Je suis heureux de faire équipe avec toi. Je tâcherai de te protéger quoi qu'il m'en coûte.
Il fallait croire qu'Amaury s'était fait un allié de poids ce matin là, finalement.
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