Page 1 sur 3 • 1, 2, 3
Cette fois-ci, il a dormi. Un sommeil plus que réparateur, après sa rencontre avec cette gamine aux cheveux bicolores dans le quatrième district. Cette nuit, il a rêvé un homme qu'il connaissait sans connaître, au sourire de démon et aux yeux jaunes comme les siens. Et la gamine, elle riait, elle riait dans ses rêves ! Au final, le rêve se termina en bain de sang quand le réveil retentit. Merci bien.
Il bouscule son chat qui miaule de mécontentement et enfile ses bottes, comme toujours galère à remonter la fermeture usée jusqu'au milieu de ses cuisses, et se prend royalement sa porte d'entrée dans la figure. Ce n'est clairement pas sa journée, et il n'est que 7 heures. Amaury prend garde à ne surtout pas croiser Altaïr dans le couloir de l'immeuble et le voilà parti en direction du siège du Conseil.
Ses pensées lézardent dans son crâne pendant qu'il se rend au travail. Dans son imagination, des yeux jaunes semblent s'attarder sur sa nuque et il frissonne. Il traîne des pieds, pensif, occupé, très loin de là où il devrait être. Plutôt littéralement. Quand Amaury relève, au lieu du grand immeuble où il est censé être, il se trouve au milieu d'un semblant de quartier résidentiel qu'il n'a jamais vu. Les rues sont vides et il est perdu. Il est 7h43 (QUOI! Oh, misère) et il n'a aucune idée d'où il pourrait même se trouver.
* Allô ? Laney.
Elle dit quelque chose, il soupire, c'est bref.
* Je serai en retard, oui.
À nouveau, elle semble s'agacer.
* Amaury ?
Il se retourne, poussé par une force invisible et cille en le découvrant à quelques mètres de lui, comme essayant de deviner s'il hallucine ou non. Il plante son regard dans le sien et n'en démord pas.
* Je sais, il est avec moi.
Il observe Aden, le détaille comme il a l'habitude de le faire. Il y a quelque chose qui ne va pas. Déjà, parce qu'Aden n'est jamais en retard, et ensuite... Il ne sait pas. Amaury a juste cet instinct qui lui dit que quelque chose ne va pas. Son regard se plante dans celui d'Aden.
Il verra bien si Aden daigne lui donner des réponses sans se faire prier ou non.
* En avance, en vérité.
Il marque un silence, un silence court et esquisse un sourire un peu fatigué.
* Et pas vraiment du bon pied.
Visiblement les nouvelles ne sont pas très bonnes. Il semble chercher quelque chose du regard, quelqu'un, mais ne trouve personne, il approche, à peine à un mètre d'Amaury, le jauge de haut en bas avant de croiser les bras. Il est sur ses gardes, on dirait.
* Tu as avancé dans ton enquête ?
Ça semble l'obstiner à présent, lui trotter dans la tête. De son poste, de son trône il ne peut rien faire, il est trop épié.
Il n'a pas peur de le décevoir, puisque cela lui semble totalement inévitable. Il se rappelle de sa rencontre avec Abysse et un frisson cruel lui est arraché. En regardant Aden, il a l'impression que ce dernier est au courant - et qu'il le regarde comme s'il était contaminé, comme s'il était possédé par une force autre, une force qui pourrait blesser Aden. Mais Amaury rit bien de son propre côté paranoïaque. Il a toujours eu énormément d'imagination.
Mieux valait dire ça, sinon il allait se faire remonter les bretelles parce qu'il n'avait pas pu la mettre hors d'état de nuire. Mais bon, hein. Il n'était pas une machine à tuer, non plus.
Il regarde Aden. Aden qui doit se ronger les sangs probablement. Aden qui doit douter de sa loyauté. Il soupire, inaudible. Il n'aurait jamais dû accepter d'enquêter pour lui.
* Amaury, tu as rencontré Abysse.
Le sourire qui nait sur ses lèvres a tout d'indechiffrable.
* Il n'a pas cherché à te blesser.
Comme s'il cherchait à se rassurer qu'Amaury est toujours là, qu'il n'est pas parti, qu'il n'est pas à lui. Il souffle fort, détourne les yeux.
* Excuse moi, je suis fatigué, je dis n'importe quoi.
Le voilà à nouveau à l'air humain, comme il se laisse entrevoir à de rares occasions auprès d'Amaury.
* Ça devient trop dangereux, laisse tomber cette mission.
Il s'en chargera seul.
Ça le surprend qu'Aden ne lui pose pas de questions pétées sur sa loyauté et sur son alignement désormais; mais connaissant Aden, peut-être qu'il est trop intelligent pour juste poser la question. Peut-être que son écartement soudain de la mission est la confirmation de la méfiance d'Aden. Ou non. En fait, Amaury est fatigué de cette partie d'échecs sans fin. C'est lui, l'échec, ici. Il observe Aden et son coeur commence à inventer des danses compliquées et rythmées.
Il se rapproche, un peu, finalement, même s'il n'est toujours pas complètement à l'aise. Ses yeux se posent sur Aden, son épaule, son cou, sa joue, ses yeux. Au final, il rebaisse la tête, presque penaud. Une partie de lui se sent mal.
Il est con. Il est con par amour, ça lui est déjà arrivé - quelqu'un au coeur aussi froid ne devrait pas être aussi stupide quand l'amour était en jeu.
Il a envie d'être là. Il a une pensée presque hautaine envers Altaïr, puis se ravise. Ce n'est pas le moment.
Il dit, comme pour confirmer quelque chose dont Amaury douterait. C'est quelque chose qu'il voit dans ses yeux, qu'il décrypte, sans comprendre ni comment ni pourquoi. Il approche encore un peu, ils sont tout proche maintenant, il pose sa main sur son épaule et capte son regard, ne semble pas vouloir s'en défaire.
* Je ne veux pas te perdre, tu sais.
Il a le sentiment que ça a déjà commencé, cependant. Qu'il faudra vite faire une croix sur Amaury, que ce n'est qu'une succession de désillusions en série, dont il est victime. Un sourire triste étire ses lèvres.
* J'ai l'impression de t'avoir affublé d'une malédiction, une mission dont tu ne ressortiras ni vivant, ni avec les réponses, et ça me terrifie.
Il avoue, à demis-mots, il avoue ses faiblesses à quelqu'un qui pourrait facilement le détruire, finalement.
Aden lui a dit qu'il ne voulait pas le perdre et c'était encore mieux que le meilleur des compliments. C'est fou, lui qui avait l'impression de foncer droit dans le mur en essayant encore et encore avec Aden, il a l'impression de ne pas totalement être dans le faux.
Ok, ce n'est peut-être pas la meilleure chose à dire à un homme déjà stressé. Aden est livide. C'est beau, ils sont assortis. Amaury finit par poser sa main sur celle qui orne son épaule, osant à peine toucher Aden, comme s'il allait le brûler.
Silence. Ses joues sont couleur pivoine, à ce stade.
Ça sonnait comme un achève moi, un enterre moi six pieds sous terre. C'était un peu ce qu'il voulait dire, honnêtement. Amaury avait terriblement peur de dire quelque chose u'il regretterait par la suite.
Il l'écoute débiter trop vite pour qu'il ne puisse le stopper et cille lorsqu'il a finit, termine même par sourire à sa remarque. Il comprend le sentiment. Oh, Aden ne parle jamais assez, sans doute parce que son cerveau est trop puissant, trop envahissant, mais bon, il comprend l'idée. Il trouve même Amaury plutôt attendrissant maintenant qu'il y réfléchit. Il observe la main posée sur la sienne et relève les yeux vers le conseiller.
* Reste à mes côtés, alors.
Il ne voulait pas le repousser, juste le protéger. Il hoche doucement la tête.
* Si tu dois sortir, la nuit, pour l'enquête ou autre chose, contacte moi.
Il ne voulait pas le savoir seul dehors, pas avec Abysse sur son dos. Il se promettait de garder un œil sur lui.
* Je suis sérieux, je ne sais pas si je me remettrais de ton absence.
Il... Ne voulait pas sonner si désespéré. C'est raté.
Page 1 sur 3 • 1, 2, 3
|
|