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Ft. Cattleya
Mes doigts contre elle étaient pourtant sûrs, une protection que je voulais lui octroyer. Une promesse tacite qu’au creux de cet étau, elle pourrait me faire confiance. Et comme le cristal s’écrasant au sol, tout ce rêve se brise lorsque de ma propre bouche s’échappe un nom qui m’est inconnu.
Mais tu le connais, toi, pas vrai ?
Je n’ai pas le temps de réaliser si oui ou non nous sommes à nouveau seul en ces lieux. Je n’ai aucune façon d’en être certain. Pas plus que je ne pourrais à un seul instant comprendre quel est le mal qui vient de saisir Cattleya. Parce que je suis le responsable, bourreau et exécuteur, moi qui n’ai pourtant rien tenu entre mes mains qu’une fleur au fusil.
Mais toi tu savais, pas vrai ? Tu savais qu’elle se reconnaîtrait, dans ce nom qui n’appartient plus à personne.
Incapable de la rattraper alors qu’elle se dérobe sous mes mains, et dans la frayeur maladive qui saisit la jeune femme devant mes yeux, je reste impuissant, n’osant l’approcher de peur de reproduire la même erreur. De peur de faire plus de mal que je n’en avais déjà fait.
Mais tout ça n’a pas de sens si tu ne fais pas le premier pas. Ou est-ce plutôt le dernier ?
Lorsqu’elle choit au sol, le mouvement lent et désordonné, je suis à ses côtés et peu importe de n’être qu’à moitié vêtu, là, dans les toilettes des femmes. Peu importe la sueur froide qui parcourt le visage de Cattleya, alors que mes doigts repoussent ses cheveux d’or. Les lèvres pincées, la douleur est si visible sur son visage, reflété dans l’étendue ambrée de mes yeux, un miroir, un simple miroir. Tout ça n’a aucun sens. Tout ça n’est qu’une illusion.
Parce qu’il n’y a pas de bonnes paroles, de bons mots. Il n’y a rien qui puisse justifier tout ça. Qui puisse expier ce péché qu’ils ont en commun. Cette dualité qu’ils ne pourront jamais avouer, alors peut-être seulement à eux deux. Je baisse les yeux, la mélancolie évidente, comme une nostalgie injuste, comme si on voulait m’arracher cette fleur de répit qu’est Cattleya dans ma vie.
Lui avouer ? Oh, si seulement elle savait…
Mes doigts se tendent et je finis de repousser ses cheveux, presque blessé par mes propres paroles. Je suis une erreur, un secret désobligeant qu’Aden dissimule. Je suis tout ce qui ne devrait pas exister mais persiste à survivre. Est-ce seulement la bonne solution ?
Tu n’as pas d’autre option.
Je lui offre ma main, ne croise pas ses yeux, je veux seulement l’aider à se relever, avant de commettre une autre faute. Avant de faire pire qu’avant. De faire le mal, comme toujours. De faire pire. De peindre ce monde d’obsidienne, comme l’obscurité profonde dans laquelle Rosario voudrait m’étouffer. C’est pour ça, n’est-ce pas, qu’Aden me cache du monde entier ? Pour ne pas souiller le reste du monde. Pour ne pas entacher la pureté des autres.
Pardon de t’avoir blessée.
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