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why the f you lying why you're always lying ≋ amaury bg
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mmmmmh oh my god
C'est pas le moment, ni le lieu, ni quoi que ce soit ((mais c'est ce soir)).
c'est dur, de se donner des rendez vous, quand on est vagabond. on n'y pense pas autrement, mais quand on a aucun moyen d'annuler à l'avance, de prévenir qu'on aura du retard, que pas là ce soir mais peut être demain je préfère... on est obligé de fixer une heure et un lieu et de s'y tenir coûte que coûte, au moins pour fixer le suivant, car il faut profiter de l'occasion que l'on a de se voir et de pouvoir se parler de vive voix.
pas le droit à l'erreur ou aux imprévus, il faut que ça passe.
pourtant Moineau veut dire : non, pas ce soir;
non, ce n'est pas un bon moment;
non, j'ai super mal en fait !
non, je viens de me foutre sur la gueule de... ((enfin, ça ne l'intéresse pas, ça, le Monsieur))
alors tant pis, il faut serrer les dents et desserrer l'étreinte presque étouffante des cousins déjà endormis sans les éveiller. une silhouette se glisse hors de l'entrepôt en grognant. l'ombre se faufile entre les lampes éteintes et les objets abandonnés et rangés à la va vite. il n'y voit pas grand chose, mais il connait le chemin, depuis le temps.
ce n'est qu'une fois à l'endroit prévu, dans une ruelle qui court derrière une usine silencieuse à cette heure, que Moineau allume la petite lampe led qu'il garde à la ceinture de son jean déchiré. il faudra bientôt la remplacer, elle faiblit et sa lumière mourante clignote de temps à autre, mais ça fera bien l'affaire pour ce rendez vous là.
un autre jour, il la désosserait patiemment en sifflotant pour passer le temps et prolonger sa durée de vie. un autre jour. là, il s'assied juste sur une caisse abandonnée là depuis des mois et déjà vidée par ses propres soins.
((putain c'est long, il arrive quand ?))
pas envie de bricoler pour attendre, ni de chantonner, ni de penser à quoi que ce soit. non. pour une fois, Moineau fait la gueule et arrache les pansements qu'on s'est empressé de coller sur ses égratignures lorsqu'il a retrouvé sa famille quelques heures auparavant. ça a beau le faire grimacer, il continue consciencieusement de les ôter un à un. ((quoi, c'est pas respectueux de laisser ses détritus traîner ? qu'est-ce que vous allez faire, l'exécuter ?))
si occupé à se sentir mal pour sa mauvaise tronche ornée d'un œil au beurre noir et les autres bleus et coupures qu'il ne veut pas compter, il n'entend même pas arriver Monseigneur avant qu'il ne soit presque devant lui.
en un sursaut, il se redresse et contrairement à ses habitudes, son visage s'assombrit. on dirait presque que tu es en retard, mon mignon. l'observation est presque crachée.
Amaury ne répond pas tout de suite à la remarque enjouée, peut-être même qu'il ne fera aucun commentaire - ce soir-là il n'a pas envie de rire. Il est même plutôt renfrogné, si on le regarde bien. Des yeux d'or luisant d'une lueur cruelle, visage blafard renfermé et des ombres de mauvaise augure dansant sur sa silhouette.
Il est loin, le ton mielleux qu'il arbore d'ordinaire, cette fois ci ses mots sont secs, froids. Peut-être qu'il laisse entrevoir son vrai visage, sans pitié, loin des masques derrière lesquels il se cache volontiers.
Amaury ne compte pas prendre racine ici, encore moins que d'habitude.
mmmmmh oh my god
Pas de jaloux, tout le monde fait sacrément la gueule, ce soir. l'un d'eux s'est déjà pris un certain nombres de coups, et ça se voit ((et non il ne dira rien)) et il est prêt à recommencer.
d'habitude, ces rendez vous se passent bien. ils échangent quelques mots, blaguent un peu, moineau lui raconte ce qu'il sait en répondant aux questions de l'autre, qui lui dit aussi quelques choses avant de se quitter sur un dernier sourire. parfait. cordial. amical. respect. connard. va bien manger tes morts.
au moins, cette fois, pas d'entourloupe, c'est tout du moins ce que pense Moineau. pas de jolis sourires pour enjoliver les propos trop sucrés et trop beaux pour être vrai.
... mais en même temps, pourquoi est-ce qu'il perdrait son temps et certaines de ses soirées pour le voir, si c'était pour lui raconter des salades ? est-ce qu'elles sont si cruciales que ça, les infos qu'il lui donne comme ça, sans trop y penser ?
cette fois, pas de flatterie inutile, ça devrait être rassurant, non ?
non.
non, ça fait quand même quelque chose, de ne plus être rassuré par ce qui doit être l'hypocrisie habituelle. c'est peut être en partie des mensonges, mais ça faisait un peu de bien.
est-ce qu'il préfère ce qui a l'air d'être l'honnêteté cruelle ou les mensonges réconfortants ? en tout cas, quelle que soit la réponse, il n'a pas le choix. ce qu'il contrôle, par contre, c'est ce qu'il fait lui, et il a décidé de faire ce qui lui chante. c'est un petit con, si vous voulez, d'accord, en tout cas, la simple remarque qui lui demande de se dépêcher l'encourage à prendre son temps.
d'abord, pour parler, il faut se lever. se redresser puis se mettre sur ses deux jambes... voilà. mais avant de faire un pas, craquer sa nuque, à gauche, à droite, ah, c'est bon. bon, maintenant qu'il est debout il se rend compte qu'il va devoir encore lever la tête tout le long, mais qu'est-ce qu'il y peut ? il va pas se percher sur les caisses... bon, tant pis. au moins, ça lui fait gagner un peu de temps, et ça en fait perdre à l'autre.
j'aimerai beaucoup de choses, mais on a pas toujours ce qu'on veut, chaton. alors c'est ça, le summum de sa rébellion ? lui faire perdre son temps et s'échanger des insultes de gamin avec un ton toujours aussi peu commode ? peut être bien. par exemple, j'aimerai bien la vérité. mais j'pense pas l'avoir avec toi. enfin, y'en a toujours un peu, si on oublie le tas de conneries autour. c'est quoi, ce soir ?
Une colère froide, meurtrière anime la flamme dans son regard sombre. Moineau s'est pris des coups ? Le pauvre. Amaury serait bien enclin à rajouter quelques bleus à la toile usée qu'est le visage du plus jeune. Ça le détendrait, tiens, ça l'aiderait peut-être. Lui-même, torturé par ses propres méfaits, ne pense plus à retrouver la raison mais bien à répandre le chaos, discrètement, sans un bruit.
Incroyable, l'insolence de l'oiseau. Les sobriquets qu'il lui trouve, peut-être qu'à un moment ils l'ont fait sourire; aujourd'hui, il a juste envie de l'étrangler. Il pourrait. C'est ce sentiment de possible qui le grise. Il s'approche, et pour une fois qu'il peut regarder quelqu'un de haut, il ne se prive pas.
Il siffle presque, serpent prêt à cracher son venin.
mmmmmh oh my god
Le bureau des plaintes est ouvert. personne ne sait qui est censé recevoir les plaintes, mais les deux silhouettes qui se tiennent dans l'allée minables se toisent salement.
Moineau se dit qu'il a le dernier des connards en face de lui, là, à cet instant, et qu'est-ce qui l'empêcherait de coller son poing dans la figure ?
à chaque pas de l'autre, il doit relever un peu plus les yeux, mais ça le fait bien rire, car qu'est-ce qu'il peut bien avoir pour lui, à part la taille ? allez, tu peux en profiter mon grand, ça n'va pas durer... ça le fait presque rire, de voir s'approcher ce prétendu géant avec ton son fiel, en espérant peut être que ça l'intimide ou que ça le fasse reculer. la vraie force, il sait ce que c'est, Moineau. il pense au dos de colosse de son soleil au fond des mines qui creuse la Terre tous les jours, il pense même à ses propres poings,
qui n'attendent plus grand chose pour se mettre en mouvement.
oh, il risque sa vie, lui ? lui ? quelle blague.
est-ce qu'il serre les fesses à chaque patrouille qu'il croise dans la rue ? est-ce qu'il a du apprendre à escalader les grillages et les murs en même temps qu'il a appris à marcher pour éviter de croiser son engeance à lui, cette bande de rats qui prétendent diriger ? une belle bande de connards incapables de les attraper et de les exécuter, quelles conséquences ils peuvent avoir sur sa vie à lui ? le choix est tout fait, pour le vagabond.
pendant un instant, il s'imagine l'insulter. l'incendier, lui hurler dessus pour le faire plier, puis vraiment le mettre à terre. physiquement. l'écraser, attraper sa trachée et la comprimer jusqu'à ce plus aucuns mensonges ne puissent jamais s'en échapper.
jamais.
il serre ses poings encore endoloris, repense à la bagarre qui vient de se passer et se dit qu'il n'est pas contre des prolongations.
il est fort, plus que lui, il en est persuadé,
et il va lui prouver.
il va lui montrer que ce ne sont pas toujours les conseillers qui décident.
il pense à tout ce qu'il pourrait faire, à comment il pourrait le frapper...
et il le fait.
en un instant, il se campe sur ses deux jambes, sent les muscles de ses jambes se gonfler et pousser de tout leur poids contre le béton, assez d'appui pour asséner un uppercut, qui perd en force mais gagne en rapidité.
ça le soulage presque, de sentir de la chair tout contre son poing.
va bien te faire enculer. il recule d'un pas et crache par terre.
il imite à moitié la voix du conseiller, mais c'est bien sa voix qui se fait entendre, dégoulinante de rage. ooh, quel bon con, mon vagabond, je vais lui raconter des conneries toute la journée et s'il est pas content je vais le briser ? tu vas rien briser, du tout. je vais t'éclater la gueule et la semaine prochaine on refera le même rendez vous et tu me diras la vérité, pour une fois.
La colère avait toujours eu l'ascendant sur lui. Enfant démon, c'était lui qui maltraitait ses petits camarades, avant de rentrer dans les rangs et d'utiliser sa haine à d'autres fins. Mais face à Moineau et à sa silhouette qu'il tient en horreur, il a bien envie de se donner à la violence à son tour, à répondre avec les poings. Il en grognerait presque, à la manière d'un chien enragé, prêt à mordre. Il l'est, d'ailleurs. S'il pouvait déchirer la chair de Moineau entre ses dents, il le ferait certainement. Il n'en avait que faire de sa dignité, que faire de son intégrité, tant qu'il pouvait saisir l'autre et lui faire mal, le marquer pour qu'il se souvienne de ce que cela fait de se mesurer à lui, il était satisfait.
Mais, non. Au final, Amaury se redresse sans un mot, amer et ignorant la rage sourde qui tape à ses tempes, qui fait bouillir son sang et teinte sa vision d'un rouge tranchant. Plus que lui rendre la monnaie de sa pièce, il voulait surtout vivre. Il supposait qu'ils avaient tous les deux le même but : seulement, Moineau était trop terriblement stupide pour le comprendre. En même temps, que pouvait-on s'attendre d'un vagabond ? Il hausse les épaules, dédaigneux au possible. Ses yeux brillent d'un éclat malveillant alors qu'il plonge son regard dans celui de l'autre homme.
Il s'éloigne, sans un mot de plus. Il suppose que le vagabond ne mérite pas d'en entendre plus de sa part.
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